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Les Premiers Capétiens 6/13 - La civilisation française au XIe siècle : langue, littérature et culture

Les Premiers Capétiens 6/13 - La civilisation française au XIe siècle : langue, littérature et culture

Retrouvez l'ensemble de nos articles de blog sur les Premiers Capétiens pour découvrir les moments clés de cette période fondatrice de l’histoire de France.

La religion : âme et unité de la société

Au XIe siècle, la France est profondément divisée par ses structures sociales et politiques. Pourtant, une unité puissante subsiste : la foi chrétienne. Cette époque est marquée par de saisissants contrastes, où l'anarchie féodale côtoie une intense ferveur religieuse. La religion imprègne tout : littérature, enseignement, arts. Elle domine la civilisation, lui confère son caractère essentiel et unit les hommes dans un même élan spirituel malgré leurs divisions territoriales et sociales.

Dialectes et diversité linguistique

La langue française du XIe siècle est aussi fragmentée que son territoire. Deux grandes aires linguistiques se distinguent clairement : la langue d'oïl au Nord et la langue d'oc (provençal) au Sud, séparées par une ligne allant de Bordeaux à Lyon. Le Nord, avec ses dialectes variés comme le picard, le normand ou le bourguignon, est dominé progressivement par le parler d'Île-de-France. Le Midi connaît des dialectes nettement différenciés tels que le gascon ou le limousin, ce dernier devant bientôt triompher grâce aux troubadours. Ces dialectes ne suivent pas strictement les divisions politiques mais plutôt les limites naturelles du territoire.

Les débuts de la littérature romane

La littérature romane naît sous l'égide du clergé. La poésie précède la prose et s'attache à traduire des livres saints ou à célébrer les vertus chrétiennes. Le poème de Saint Alexis, œuvre archaïque du milieu du XIe siècle, illustre parfaitement ce début littéraire religieux. Récit pathétique d'un noble italien qui sacrifie l'amour terrestre pour une vie d'humilité et de sainteté, ce texte représente la première grande réalisation littéraire en français.

Les chansons de geste, en revanche, célèbrent les exploits guerriers des héros historiques ou légendaires, comme Charlemagne et ses pairs. Bien que peu de ces œuvres primitives aient survécu, elles annoncent le grand épanouissement épique du XIIe siècle. À côté se développent modestement des chants lyriques populaires liés aux fêtes saisonnières, et les premiers récits mettant en scène des animaux, précurseurs du célèbre Roman de Renart.

La littérature latine, prédominance intellectuelle

La littérature romane naissante reste modeste face à la puissance de la littérature latine, qui règne sans partage grâce au monopole intellectuel de l'Église. Clercs et moines produisent abondamment commentaires bibliques, traités théologiques, récits de vies de saints, chroniques historiques, tous profondément imprégnés de piété. Poètes et prosateurs latins, malgré leur manque d’originalité créatrice, témoignent d’une grande fécondité littéraire, appréciée par un public religieux indifférent à la répétition ou à la sécheresse des textes.

L'Église, maîtresse de l'enseignement

L'Église détient le monopole de l'enseignement, assuré exclusivement par le clergé. Les grandes écoles, généralement liées aux cathédrales et aux abbayes, comme celles de Reims, Chartres ou du Bec, connaissent un remarquable prestige. Gerbert à Reims, Fulbert à Chartres, Lanfranc au Bec attirent des élèves de toute l’Europe. L’enseignement, basé sur les « sept arts libéraux », est pourtant limité et aride, essentiellement tourné vers la théologie. L'apprentissage se résume souvent à la lecture commentée des auteurs classiques latins, sans place véritable pour la créativité intellectuelle.

Les limites de la pensée libre

Malgré l'omniprésence du dogme religieux, quelques tentatives de pensée libre émergent timidement. Des hérésies comme celles de Bérenger de Tours ou d’Orléans apparaissent sporadiquement, remettant en cause des dogmes fondamentaux comme l'Eucharistie. Mais ces mouvements, vite condamnés, ne trouvent guère d’écho populaire et sont réprimés avec violence. Ainsi, le roi Robert le Pieux inaugure, en 1022, la peine du bûcher contre les hérétiques d’Orléans, marquant un premier pas vers l’intolérance violente qui dominera les siècles suivants.

Épanouissement de l'art roman

Parallèlement, l’art roman exprime magnifiquement la ferveur religieuse du XIe siècle. Partout en France, les églises, reconstruites en pierre après les invasions normandes, s’ornent d’arcades, de voûtes en berceau ou d’arêtes, de chapelles absidales et de décorations sculptées ou peintes. L’architecture romane, solide et massive, reflète la société féodale tout en annonçant l’élan vertical qui caractérisera plus tard le gothique. Cet art, marqué d’influences latines et byzantines, devient pourtant profondément français, incarnant une spiritualité joyeuse et colorée.

Ainsi, la civilisation du XIe siècle, malgré ses contradictions et ses limites, marque une étape décisive dans l’épanouissement intellectuel, littéraire et artistique de la France médiévale.

Illustration : Gillot Saint-Evre (1791–1871), Philippe Ier, roi de France (1052-1108)

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